Ceux qui se questionnent sur le repositionnement à venir des réseaux éducatifs trouveront peut-être ici quelques explications. Comme l’illustre la figure 1, les enjeux de repositionnement sont énormes. Cette remarque vaut à la fois pour l’enseignement supérieur (quadrants supérieurs) et les classes normales et professionnelles (quadrants inférieurs).
Le cas de l’enseignement supérieur
Du côté de l’enseignement supérieur, nos facultés devront composer dans les années à venir avec quatre enjeux importants:
- La spécialisation à l’échelle mondiale. Le positionnement recherché à ce niveau sera celui d’entités globales spécialisées. Les réseaux configurés de la sorte pourront offrir des contenus sophistiqués dont la performance surpassera celle des contenus à petite échelle de nos facultés actuelles. On pourra aussi bâtir un réseau technique avec des collaborateurs de choix permettant un positionnement privilégié auprès des clientèles sélectionnées et des employeurs de premier plan.
- Une segmentation plus fine des formations intermédiaires. La multiplication des contenus de qualité à moindre coût va par ailleurs permettre une segmentation plus fine des clientèles intermédiaires en respectant davantage leurs besoins et la diversité des profils d’apprentissage. Ce repositionnent sera surtout l’affaire de grands réseaux intégrés dont l’envergure de produits et l’expansion géographique seront des facteurs importants de succès.
- Un recours croissant aux applications génériques pour les formations de base. Le positionnement à ce niveau permettra d’offrir un contenu évolutif de grande valeur, mais à moindre coût. Pour y arriver, ce genre de réseaux chercheront à tirer pleinement avantage de l’efficience des plateformes virtuelles. On misera aussi sur de nouvelles sources de revenus comme la publicité et les autres formes de monétisation de l’achalandage pour abaisser les coûts.
- Le développement des compétences pour favoriser l’accès (EtoE) et le maintien en emploi (EtoB). Qu’il s’agisse des réseaux spécialisés, intégrés ou des réseaux à moindres coûts, on misera beaucoup sur cette approche transversale.
Peu importe le positionnement privilégié par les différents réseaux, le fait est qu’à l’issue du prochain repositionnement, le monopole des facultés académiques sur l’enseignement supérieur aura été pratiquement démantelé.
Le cas des classes normales et professionnelles
Le repositionnement au niveau de l’enseignement normal et professionnel sera tout aussi important que celui de l’enseignement supérieur. Quatre enjeux vont influencer ce repositionnement:
- La course aux contenus et aux réseaux à valeur ajoutée. Les programmes avancés (STEM, informatique, robotique, et autres formations spécialisées et professionnelles) ainsi que les réseaux à valeur ajoutée (écoles sélectives) n’auront pas le choix, s’ils veulent survivre ou percer, de se lancer dans cette course. Le positionnement recherché obligera des investissements importants dans les contenus, les technologies et des ressources adaptées aux nouvelles exigences posées par de tels réseaux. Cette course impliquera aussi des alliances et des partenariats ainsi qu’une forte expansion géographique.
- La distribution numérique de masse. L’arrivée de contenus et de réseaux avancés fera en sorte que la médiane restante devra être servie par des réseaux misant sur la plus haute qualité possible à moindre coût. Or, la seule façon d’y arriver sera de se doter de réseaux de distribution et d’encadrement numérique de masse, du moins pour la prise en charge de la portion la plus standard des programmes.
- La monétisation de l’achalandage. Tout comme dans le cas de l’enseignement supérieur, on s’attend à un accroissement des sources de revenus non traditionnelles comme la publicité, les ventes croisées et d’autres formes de monétisation de l’achalandage.
- La forte virtualisation des contenus et du fonctionnement des environnements de travail. On s’attend à un effort très important du côté du développement d’environnements virtuels de travail (simulation, cours-réalité, accès aux ressources expérimentées) pour aider les clientèles à faire la transition vers le marché du travail ou à maintenir leur emploi. Cette tendance sera un facteur de positionnement particulièrement critique au niveau des réseaux à haute valeur ajoutée, mais aussi dans les programmes de base et ceux dont les clientèles sont plus susceptibles de vouloir se prêter à des formations virtuelles disponibles en temps réels.
Conclusion
La principale conclusion à retenir à mon avis est que nous sommes en route vers le développement d’un marché applicatif qui va prendre simultanément d’assaut les marchés spécialisés, les produits standardisés de grande qualité, les plateformes EtoE et EtoB ainsi que les marchés de commodités, la distribution numérique de masse et ceux des gratuités (contenus libres et payés par l’achalandage).
La seconde conclusion est que ce repositionnement ne se fera pas sans heurts pour nos réseaux actuels. Il va exiger de grandes remises en question et surtout une vision, des stratégies et une capacité d’exécution différentes de ce qui est présentement. C’est en partie pour cette raison que nous avons cru bon d’esquisser de la sorte la nature des changements à venir.